28 février 2011

Photographies de Aurélia Blanc

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Aurélia Blanc est une jeune photographe free lance. Diplômée de l’ENSAD de Paris, elle travaille pour des diffuseurs en tant que photographe de plateau, photographe institutionnel et photographe de portrait. Par ailleurs, c’est le portrait qui fonde son identité de photographe tant au plan professionnel que dans son parcours de recherche personnelle.

Voici, extrait des « Séries » de Aurélia Blanc, une présentation des portraits « Uncertain Age », prise de vue en lumière naturelle, l’éclairage privilégié de la photographe. Cette série sera exposée aux « Photographiques du Mans » du 12 mars au 3 avril 2011 au Parc Théodore Monod. Ci-dessous, Arielle, un des 7 portraits de l’exposition.








Le trouble

Photographies de Aurélia Blanc

Troublante, l’exposition des photos de Aurélia Blanc ! Des portraits sériels de femmes d’âge mûr, visages mis à nu, dévisagent le regardeur, aux fenêtres pastel du temps qui passe. Perce-neige, mentholé, perle fine, beige rosé, crème, rose givré, gris souris, aurore boréale, mauve mouvant, pistache tendre, gris souris encore… puis rien, que l’horizon blanc.

La pose identique des modèles fait penser à l’expérimentation scientifique, et induit une attitude figée de portrait vérité à l’encontre de la photo séduction. Ascèse de la composition, sévérité du cadrage carré, accentuent le taillant du portrait, statufié en buste grand décolleté. La luminosité du fond enrobe de douceur les chairs, texturées des plissures de la vie, et du sillon, là, tout près du coeur. L’approche clinique, sous lumière naturelle, donne un côté monacal aux œuvres. Le modèle, tenu de fixer l’objectif sans sourire, est astreint au silence : plongé en apnée sous le regard au scanner de la photographe, fiché à la manière du papillon piqué au support. Parfois une rosée de larmes a dû perler à la source des cils tant les yeux brillent…

Aurélia Blanc conceptualise-t-elle la représentation pour que la force du regard saute aux yeux ? Clouer les modèles au pilori de l’observation, c’est un peu se projeter dans les regards de ces figures de proue sous tension, qui n’ont cesse de questionner les miroirs parallèles, multipliés à l’infini des interrogations. A son tour, le regardeur, regardé en tête-à-tête, se retrouve à visage découvert, d’où son émoi.

Les photos de Aurélia Blanc ne donnent pas prise à l’anecdote, aucun signe extérieur d’époque ou de lieu, elles voguent dans un absolu de lumière ! Pourtant, ces portraits intemporels nous sont proches. Ces femmes, en proie à l’objectif, n’ont pas loisir de composer un personnage et restent vraies. On en perçoit sérénité, vitalité, bonté ; leur regard reste celui de l’enfant étonné, sous-tendu d’une inquiétude existentielle en résonance avec la tendresse. La photo révèle en retour la beauté de la personnalité profonde de chacune.

Tout a commencé par le portrait de sa mère, qu’Aurélia réalise dans une lumière « enveloppante et froide » sous impulsion d’une fascination, trouble fondamental au travail de création. Habitée du bonheur de sa prise de vue à offrir en partage, Aurélia est déçue que sa mère n’y voit que « le flétrissement de la peau. » A partir de ce choc frontal, elle est déterminée à faire un reportage d’investigation sur l’image de la femme quinquagénaire. Ainsi, est-elle amenée à photographier des amies de sa mère, toutes de cette tranche d’âge, sur le lieu de leur domicile, comme pour reconstituer l’intimité de l’émotion première. Une façon d’être avec les gens, au plus près de cette sensibilité qui capte les frémissements des fragilités pour en faire des forces au filtre de la spiritualité.

Sensitive, cette galerie de portraits arc-en-ciel à jouer avec le temps ! L’oeuvre qui manque à l’appel est le portrait originel.

Marie-Lydie Joffre
27 janvier 2011







Site de Aurélia Blanc
Série « Uncertain Age » exposée aux Photographiques du Mans







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